Le CBD dans le sevrage de l’alcool

En France, l’addiction à l’alcool toucherait environ 1,5 millions de personnes, tandis que 2,5 millions d’individus auraient une consommation à risque. Si la consommation d’alcool a nettement diminué au cours du siècle dernier, elle reste toutefois à des niveaux élevés et un enjeu de santé publique majeur. En outre, l’Hexagone se classe en 15ème position des pays de l’Union Européenne où la consommation est la plus forte par habitant, ce qui la place légèrement au-dessus de la moyenne. Bien qu’il ait des conséquences délétères sur la santé et les relations socio-professionnelles, l’alcoolisme se traduit par une incapacité à résister à l’envie de boire de l’alcool. Molécule issue du chanvre, connue pour ses nombreux bienfaits sur la santé physique et mentale, le CBD pourrait-il aider au sevrage de l’alcool et à en supporter les effets ? On vous en dit plus.
La dépendance à l’alcool et les comportements à risque
Critères d’une consommation d’alcool à risque
Selon les autorités sanitaires françaises, toute consommation d’alcool quelle qu’elle soit présente un risque, mais à des degrés divers. L’expression “à risque” s’applique toutefois à un type de consommation dont la fréquence et les quantités bues impliquent, à terme, des effets néfastes sur la santé physique et mentale, voire un impact sur la vie sociale.
Un seuil, entre consommation raisonnable et excessive, a ainsi été établi par des scientifiques de l’Institut national du cancer et de Santé publique France, en 2017. Ces derniers estiment à 10 verres, pour les adultes, la quantité maximum acceptable de boissons alcoolisées ingérée par semaine. Ils fixent également un critère journalier, avec un total de 2 verres quotidiens à ne pas dépasser.
Enfin, ils préconisent de :
- ne pas boire tous les jours ;
- diminuer le nombre de verres bus en une seule occasion ;
- boire lentement, et si possible en mangeant et en buvant de l’eau en parallèle.
L’alcoolodépendance : définition de l’addiction à l’alcool
Ce que l’on qualifie habituellement d’alcoolisme devrait être nommé, selon l’OMS (l’Organisation Mondiale de la Santé), “alcoolodépendance”. En effet plus précis, le terme permet de distinguer la dépendance physique, comportementale et neuro-psychologique durable, de l’action qui consiste à boire en quantités excessives. L’addiction à l’alcool est également indépendante des dégâts causés sur l’organisme, bien qu’elle en augmente considérablement les risques. Une personne “accro” peut ainsi ne pas présenter de lésions sur ses organes ; et vice versa.
Si la consommation moyenne d’alcool est passée de 22 litres par personne et par an, en 1970 (soit 5 verres par jour), à 12 litres actuellement (2,6 verres par jour), elle reste encore trop importante. En particulier chez les hommes, dont le nombre de verres moyen par jour s’élève à 4,4. En outre, 1,5 millions de français présenteraient une addiction à l’alcool, avec 14 % des hommes concernés, contre seulement 5 % des femmes. Une dépendance qui survient le plus souvent après l’âge de 25-30 ans. Le nombre de décès annuels dûs à une consommation excessive d’alcool en France est, quant à lui, estimé à environ 33 000 à 49 000.
Le passage d’une consommation excessive à l’alcoolodépendance
L’altération de la neurochimie cérébrale
L’ingestion répétée de boissons alcoolisées, et en trop grandes quantités, peut conduire à l’alcoolodépendance, par l’altération de l’équilibre neurochimique du cerveau. Cette évolution a lieu en deux phases :
- Le fait de s’habituer aux effets et à la présence d’alcool accroît, dans l’organisme du buveur, sa tolérance. La quantité d’alcool à ingérer pour obtenir les mêmes effets que par le passé, augmente alors.
- L’individu devient alcoolodépendant dès lors qu’il perd le contrôle sur sa consommation, et que son arrêt provoque une sensation de manque intense.
Les mécanismes biologiques expliquant ces changements et les effets de l’alcool sont notamment dûs aux perturbations provoquées par l’éthanol, composé des boissons alcoolisées, sur :
- les récepteurs GABAA, qui réagissent au GABA, un neurotransmetteur inhibant l’activité neuronale ;
- les connexions entre les neurones, qu’il contraint à un remodelage ;
- la synthèse de dopamine, molécule du plaisir qui joue un rôle clé dans le “circuit de récompense” ;
- les récepteurs CB1 du système endocannabinoïde, qui dirige entre autres ce circuit de récompense.
Tolérance et accoutumance : les perturbations neurologiques provoquées par l’éthanol
L’éthanol, que l’on nomme aussi alcool éthylique, a tendance à suractiver les récepteurs GABAA, et donc leur réponse aux neurotransmetteurs GABA. Inhibiteurs de l’activité neuronale, ces derniers, lorsqu’ils agissent en excès, atténuent les capacités cognitives et motrices ; d’où les symptômes constatés en état d’ivresse. Or, la consommation fréquente d’alcool peut, à force, diminuer la sensibilité des récepteurs à l’éthanol, incitant le buveur à consommer davantage pour ressentir les mêmes effets. La tolérance se transforme en addiction.
Cette sensation de plaisir momentané, que l’individu alcoolodépendant cherche inlassablement à revivre, est également au cœur des mécanismes de la dopamine, l’une des “hormones du bonheur”. Synthétisé par les neurones de la zone mésencéphale, ce neurotransmetteur est libéré lors de toute activité perçue comme agréable, satisfaisant ainsi notre “circuit de récompense”. En présence d’éthanol, sa concentration devient toutefois anormalement élevée, pendant un temps réduit, dans le noyau accumbens ; une zone étroitement liée au mésencéphale. Consommé trop fréquemment, l’alcool diminue également la capacité des neurones à produire de la dopamine entre les prises, conduisant à un manque que seul l’éthanol permet alors de combler.
Enfin, le remodelage des connexions entre les neurones, rendu possible grâce au phénomène de plasticité cérébrale, permet au cerveau de s’adapter à la présence d’éthanol et d’atténuer les effets de l’alcool.
Les traitements et thérapie habituels
La prise en charge de l’alcoolodépendance est généralement effectuée par plusieurs spécialistes, dans divers domaines. Les causes et les impacts de l’alcoolisme ont en effet des ramifications variées, tantôt médicales, psychologiques ou sociales. Le patient peut alors être accompagné à la fois par un psychologue et un médecin addictologue, ou encore trouver du réconfort et des encouragements parmi des groupes de soutien.
Une aide au sevrage peut être proposée, par le biais de solutions médicamenteuses, combinées à un suivi psychologique, ou de séjours plus ou moins longs en structures hospitalières. Les médicaments sont préconisés en cas de manque physique. On peut par exemple citer les benzodiazépines, des anxiolytiques prescrits lorsque le sevrage s’accompagne de crises d’angoisse, d’irritabilité ou de troubles du sommeil.
Le patient devra également s’hydrater correctement, en buvant beaucoup d’eau, et se verra généralement prescrire des vitamines B1 et B6.
CBD et sevrage de l’alcool : le cannabidiol peut-il aider à soigner l’addiction ?
Le cannabidiol et le système endocannabinoïde
Le circuit de récompense et la production de dopamine sont notamment dirigés et régulés par notre système endocannabinoïde (ou “SEC”). Il s’agit d’un groupe de récepteurs, neuromodulateurs et neurotransmetteurs qui assurent le bon équilibre de divers paramètres physiologiques comme l’humeur, l’appétit ou le sommeil. Les composés synthétisés par le corps à cet effet, les “endocannabinoïdes”, agissent sur des récepteurs propres à ce système, nommés CB1 (situés principalement dans le système nerveux) et CB2 (dans le système immunitaire), pour réguler l’activité cellulaire.
Les endocannabinoïdes ont une structure proche des cannabinoïdes issus du chanvre et du cannabis, comme le CBD (cannabidiol) ou le THC. À la différence de ce dernier, le CBD, lorsqu’il est consommé, n’agit pas directement sur les récepteurs des endocannabinoïdes mais inhibe l’enzyme FAAH, responsable de la dégradation d’un endocannabinoïde, l’anandamide. Il stimule ainsi le fonctionnement du SEC sans interférer avec les récepteurs et, contrairement au THC, ne provoque ni dépendance ni effets psychotropes.
Le CBD contre la dépendance à l’alcool
En cas d’accoutumance à l’alcool, on peut constater une baisse du nombre de récepteurs à endocannabinoïdes CB1, qui empêche le fonctionnement normal du circuit de récompense. La prise d’éthanol vient alors combler un manque que le système endocannabinoïde n’est plus en mesure de combler et réguler.
Le cannabidiol peut aider à mieux supporter les sensations de manque (le “craving”), rencontrées dans toute forme de sevrage, entre autres grâce à sa régulation du circuit de récompense. S’il stimule la production de dopamine lorsqu’il est consommé, le CBD ne l’affecte pas négativement en dehors des prises, au contraire de la plupart des drogues. Il permet ainsi de contrebalancer le manque de dopamine ressenti par les personnes accoutumées à l’alcool, en faisant revenir le neurotransmetteur à des concentrations plus proches de la normale. En outre, la synthèse de dopamine par les cellules nerveuses n’est pas conditionnée à la prise de CBD, ce qui fait que le cannabidiol n’entraîne pas de sensation de manque.
Enfin, le CBD pourrait aider à soulager de nombreux symptômes liés à l’addiction et au sevrage de l’alcool, mais aussi à sa consommation elle-même :
- il atténue le stress et les états anxieux ;
- son action anti-inflammatoire permet de lutter contre la neurodégénérescence induite par l’alcool ;
- il permettrait également de prévenir la formation de lésions hépatiques.
Grâce à ses propriétés relaxantes, et à sa régulation du système de récompense et des taux de dopamine, le CBD pourrait donc aider à mieux supporter le sevrage de l’alcool. Il faut toutefois noter que la consommation de cannabidiol ne se substitue pas à une thérapie et à la prise d’un traitement pharmacologique. Il conviendra également, afin d’éviter toute interaction médicamenteuse ou risque de surdosage, de systématiquement demander l’avis de son médecin avant d’envisager le CBD dans le sevrage de l’alcool.
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